Luz ou le temps sauvage d'Elasa Osario
Argentine. 1975. Les temps sauvages de la dictature militaire : arrestations sommaires, tortures, rapts d'enfants, assassinats. Liliana est une de ces prisonnières politiques dont le sort fatal est déjà réglé ; cependant, elle s'apprête à donner la vie... et ce nouveau-né est déjà l'objet de convoitise de deux couples de militaires. Cet intérêt épargne à la future mère, pour un temps, les sévices corporels mais la torture psychologique est bien là : on va lui voler son bébé, elle le sait !
Vingt ans plus tard. A la naissance de son fils, Luz, pétrie de doutes, s'interroge sur ses propres origines et, contre l'avis de sa mère avec qui elle entretient des relations conflictuelles, elle part en quête de son passé. Cette quête la mène face à son histoire et celle de son pays qu'on lui avait toujours tue.
C'est en Espagne qu'on la rencontre pour la première fois face à un certain Carlos...
Une intrigue prenante servie par un récit essentiellement construit sur des retours en arrière et sur une alternance de narration et de commentaires de Luz et Carlos. Comment ne pas être touchée par le sort de ces femmes et de ces enfants quand on est soi-même Maman ? L'émotion est renforcée par certains passages d'une authenticité bouleversante.
Cette intrigue a aussi le mérite de rappeler à notre mémoire une Histoire souvent fort méconnue et pourtant si proche de nous dans le temps. Les exactions militaires sont traitées avec une juste pudeur : dire l'horreur, la dénoncer, sans tomber dans le voyeurisme d'un catalogue des tortures.
Deux reproches toutefois à l'écriture. Le premier est lié au mode de narration. En effet, la narratrice de ce roman est Luz puisqu'elle conte à Carlos son enquête et son histoire, or à diverses reprises elle semble céder sa parole, maladroitement je trouve, à d'autres personnages : ces changements sont parfois injustifiés. L'autre reproche est destiné à la maison d'édition qui semble faire peu de cas des régles de ponctuation : faudrait-il rappeler qu'on ne met de majuscule ni après un double point ni après un point-virgule ?
Malgré ces derniers reproches, je garde un bon souvenir de cette lecture et des émotions suscitées. Merci Martine pour ce roman.